Dossier PRODAC : Mame Mbaye Niang encore cité, des milliards de FCFA introuvables
C’est le journal Yoor Yoor qui en parle, ce mercredi 23 octobre 2024. Le Programme des Domaines Agricoles Communautaires (PRODAC), créé par le décret 2014-498 du 10 avril 2014, devait conduire à une transformation structurelle de l’économie sénégalaise, avec une augmentation de la production générant de la croissance et des dizaines de milliers d’emplois, principalement pour les jeunes et les femmes.
Néanmoins, le nouveau coordonnateur national du programme, Cheikh Ahmadou Ngom, a révélé qu’après une décennie de mise en œuvre du PRODAC, les résultats obtenus n’ont pas été à la hauteur des attentes et des montants investis. Il précise que, sur les neuf domaines agricoles communautaires, seuls deux sont « relativement » fonctionnels.
Pourtant, des milliards de FCFA ont été déboursés et versés sur des comptes bancaires sans que les travaux prévus ne soient réalisés. Le PRODAC s’était fixé pour mission, dès ses débuts, de contribuer activement à la réduction de la précarité sociale en milieu rural et périurbain, en promouvant l’entrepreneuriat agricole, particulièrement auprès des jeunes et des femmes. Sur le papier, c’était un excellent programme. Les acteurs du secteur espéraient qu’il allait révolutionner la pratique de l’agriculture au Sénégal. Cependant, après une décennie d’activités, le bilan est un grand échec, un fiasco monumental à tous les niveaux. En effet, le PRODAC n’a pas atteint les résultats escomptés. Cheikh Ahmadou Ngom a déclaré lors de l’atelier de pré-validation du document d’orientation stratégique et opérationnelle horizon 2029 (DOSOP-H29), qui se déroule du 21 au 25 octobre à Saly, que les objectifs n’ont pas été atteints.
Le coordonnateur du PRODAC a souligné qu’il y a neuf domaines agricoles communautaires qui ont été mis en place, mais à ce jour, seulement deux sont fonctionnels. De plus, aucune unité autonome d’exploitation ni de groupements d’entrepreneurs agricoles n’ont été constitués, et les aménagements nécessaires pour permettre aux populations de travailler dans ces domaines ne sont pas encore livrés, ce qui constitue un facteur de blocage. Des lenteurs administratives ont retardé la livraison des domaines, empêchant ainsi le démarrage des activités. C’est pour cette raison que les acteurs du secteur sont en conclave à Saly pour cinq jours afin de prévalider un document d’orientation stratégique et opérationnelle pour l’horizon 2029.
n ce qui concerne les nouvelles orientations du programme, Cheikh Ahmadou Ngom a annoncé que la stratégie reposera sur trois piliers fondamentaux : la mise à disposition d’infrastructures de qualité en quantité suffisante, le renforcement des capacités techniques, financières et matérielles des acteurs, ainsi que l’amélioration significative du mode d’intervention du programme.
Mame Mbaye Niang : De la plainte à la fuite
Depuis trois ans, les Sénégalais attendent que toute la lumière soit faite sur le dossier PRODAC, pour lequel la Banque Islamique de Développement (BID) avait accordé une enveloppe de 47 milliards de FCFA à l’État du Sénégal. Il convient de rappeler que le PRODAC devait, dès son lancement, contribuer significativement à l’aménagement de quatre domaines agricoles communautaires : Keur Momar Sarr (Louga), Keur Samba Kane (Diourbel), Itato (Kédougou) et Séfa (Sédhiou). Cependant, peu de choses ont été réalisées dans ces domaines. Dès le début, des soupçons de scandale ont émergé.
Dans son livre intitulé Lettre au peuple : PRODAC, un festin de 36 milliards de francs CFA, le coordonnateur du Forum Civil, Birahim Seck, avait révélé que l’État du Sénégal ne s’était pas seulement engagé à hauteur de 29 milliards de FCFA, mais plutôt sur 36 milliards de FCFA, avec un plan de remboursement. Il avait été précisé que, dans la première phase quinquennale, quelque 30 000 hectares de terres aménagées sur neuf sites devraient bénéficier aux jeunes entrepreneurs agricoles. Cependant, des milliards ont été dépensés sans que les travaux n’aient été réalisés sur le terrain.
L’opposant principal sous le régime de Macky Sall, Ousmane Sonko, avait dénoncé la mauvaise gestion et les détournements de fonds publics sous la direction de Mame Mbaye Niang. Ce dernier, proche du clan Faye-Sall, devenu ensuite ministre du Tourisme, avait poursuivi en justice l’ex-maire de Ziguinchor. Le 8 mai 2023, Sonko avait été condamné à six mois de prison avec sursis pour diffamation et injure publique, et à payer des dommages et intérêts d’un montant de 200 millions de FCFA. Mame Mbaye Niang avait organisé une conférence de presse pour se réjouir de l’inéligibilité de Sonko à la présidentielle de 2024. Avant même la passation de pouvoir entre Macky Sall et Bassirou Diomaye Faye, Mame Mbaye Niang avait quitté le pays précipitamment.
Une fois arrivé au pouvoir, Ousmane Sonko, en tant que Premier ministre, avait déclaré avoir en sa possession le fameux rapport de l’Inspection Générale des Finances (IGF) sur la gestion du PRODAC, qui avait été transmis à la Division des Investigations Criminelles (DIC) suite à une plainte déposée par l’Agent Judiciaire de l’État.